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Le Parlement a adopté, les 26 et 27 février 2014, la version définitive du projet de loi sur la formation professionnelle. Quelles conséquences pour les entreprises ? Quels impacts pour la formation et les ressources humaines ? ConvictionsRH a pris le pouls des réactions des professionnels RH dans la presse et sur le web.

ANI tout le monde à un avis

Issue de l’accord national interprofessionnel (ANI) du 14 décembre 2013, la toute nouvelle loi relative à la formation professionnelle, à l’emploi et à la démocratie sociale a pour double objectif la sécurisation des parcours professionnels et la compétitivité des entreprises. Sera-t-elle source de contraintes ou au contraire d’opportunités nouvelles pour les entreprises ? Les spécialistes RH, dans les médias, ont émis des avis bien divers sur les points clefs de cette loi. Voici les 5 principaux sujets qui font débat.

 

Contribution unique à la formation professionnelle : investissement gagnant ?

Finie la contribution du 0,9% au titre du plan de formation pour les grandes entreprises. La contribution fiscale au financement de la formation professionnelle sera désormais versée aux Organismes Paritaires Collecteurs Agréés (OPCA), et s’élèvera, pour les TPE, à 0,55% de la masse salariale et à 1% pour les entreprises de plus de dix salariés.

La fin de cette obligation fiscale va peut-être avoir pour conséquence « que la formation ne soit plus une priorité pour de nombreuses entreprises », estime Xavier Olry dans Le quotidien de la formation. Le blog Innovation learning technologies va plus loin : « une entreprise qui finance ses formations doit s’assurer de la réelle utilité de celles-ci : former pour remplir des quotas, c’est une perte de temps et d’argent pour tous ».

 

Remplacement du DIF par le CPF : un compte à risques ?

Mesure phare de la réforme de la formation professionnelle : le Droit Individuel de Formation (DIF) a été remplacé par le Compte Personnel de Formation (CPF). Ce compte permet à tout salarié d’accéder, à partir de 15 ans et jusqu’à la retraite, à des formations qualifiantes et certifiantes, de transférer ses droits à la formation d’un employeur à l’autre, et de les conserver en cas de chômage.

La majorité de l’écosystème RH a salué cette mesure, qui « devrait favoriser le renforcement des ressources et des compétences professionnelles des salariés et des personnes sans emploi afin de doper leur employabilité », estime ainsi le site Juritravail. Certaines craintes demeurent cependant. « Il ne faudrait pas que le CPF devienne une manière de « consommer » des formations inutiles ou futiles pour le salarié », estime ainsi l’organisme de formation Demos.

 

Entretien professionnel : opportunité salutaire ou réelle contrainte ?

Pour éviter cet écueil, des garde-fous ont été mis en place, parmi lesquels l’entretien professionnel. Un point sera fait avec chaque salarié sur ses possibilités d’évolution tous les deux ans. Si au bout de six ans les objectifs d’évolution professionnelle et salariale du collaborateur ne sont pas atteints, les entreprises d’au moins 50 salariés devront abonder de 100 heures son CPF et le financer. La sélection des formations éligibles par branche, Opca ou régions, «  sera peut-être à l’origine d’une nouvelle usine à gaz », prévient Danielle Kaisergruber, Présidente du Conseil National de la Formation Professionnelle Tout au Long de la Vie, Interrogée par Rhexis dans son blog Management de la formation. Un décret précisera les critères retenus.

Plusieurs voix ont également rappelé que les actes formels de formation n’étaient pas les seuls moyens de former un salarié. « Une lecture plus ouverte de la façon dont l’employeur peut contribuer au maintien ou au développement des compétences pourrait sans doute permettre à beaucoup plus de salariés d’apprendre tout au long de leur vie professionnelle », regrette ainsi Mathilde Bourdat de Cegos.

 

Comment rendre la réforme efficace ?

La plupart des acteurs RH louent néanmoins l’ambition d’une réforme qui a « tout d’une grande », selon Nadia Rakib de Miroir Social. Mais ce grand chantier qui s’ouvre désormais représente aussi « un risque important pour le responsable formation et son équipe s’ils n’opèrent pas la transformation attendue… Et si la direction générale et celle des ressources humaines ne constatent pas de réelle valeur ajoutée et un retour sur investissement démontré », estime dans La Tribune Jérôme Lesage, PDG de Place de la Formation.

Pour la réussite de cette organisation, le DRH doit même aller au-delà du constat, et associer formation des salariés et stratégie de l’entreprise. Dans E-learning letter, Marc Dennery, cofondateur de C-campus, résume ainsi la situation : « si notre société veut réellement des salariés-apprenants, il lui faudra bien plus qu’une loi : des moyens et un accompagnement. Aux entreprises d’y contribuer, et au premier chef aux services RH et formation. Le pourront-ils ? Le voudront-ils ? Reste à savoir comment eux-mêmes interprèteront la réforme… ».

Tandis que des négociations complémentaires dans les branches de l’intérim, du bâtiment et des travaux publics auront lieu jusqu’à septembre 2014, et que la réforme de l’inspection du travail a été reportée, la réforme de la formation professionnelle soulève encore bien des interrogations. Le CPF et ses autres applications permettront-ils à la formation professionnelle d’atteindre les buts recherchés ? Ou peineront-ils à s’imposer, à l’instar du contrat de génération ? La fonction RH détient une partie de la solution…