Aujourd’hui, le recrutement se caractérise par la complexité de faire coïncider les attentes des candidats et les besoins de l’entreprise. Depuis plusieurs mois, la plupart des secteurs d’activité font face à de fortes difficultés de recrutement, et ce pour tous types de profils recherchés. Selon une étude de l’Ifop pour Cleverconnect et PageGroup en mai 2022 (1), 86% des recruteurs affirmaient rencontrer des difficultés pour pourvoir les postes. Plus récemment, l’APEC a publié un bilan du recrutement (2) des cadres en 2022, qui souligne qu’1 entreprise sur 4 a renoncé à un projet de recrutement tant le processus pour identifier et trouver le candidat adéquat était compliqué. Dans ce contexte mouvant et incertain, la technologie fait office de “bras droit” aux fonctions RH en charge du recrutement. Mais quels sont ces outils digitaux qui transforment en profondeur le recrutement des entreprises ? Comment peuvent-ils renforcer l’expérience candidat et améliorer la marque employeur ?
Des outils digitaux qui se multiplient pour soutenir le recrutement
Si la digitalisation de la fonction recrutement s’est nettement accélérée en raison de la tension du marché de l’emploi et de nouveaux usages adoptés par les candidats durant la crise sanitaire, les outils digitaux existent, en réalité, déjà depuis de nombreuses années. De nombreuses start-up, en France, ont émergé pour offrir des solutions technologiques qui répondent aux besoins des fonctions RH.
Déjà en 2018, 29% des solutions adhérentes au LabRH étaient rattachées au domaine du sourcing qui fut l’un des premiers à se digitaliser. Le Marketing RH se développait également avec 14% des start-up spécialisées dans ce domaine. Par ailleurs, l’IA continue de se démocratiser pour automatiser certains processus RH et fluidifier les échanges. Aujourd’hui, le panel de solutions disponibles sur le marché s’étend encore un peu plus pour offrir aux entreprises des solutions “best of breed”, sur tout ou partie du processus de recrutement.
Le premier salon “HR Technologies” qui s’est déroulé les 1er et 2 février dernier illustre bien la propension prise par les outils digitaux dans les méthodes de travail RH et les processus de recrutement. Aujourd’hui, les innovations semblent davantage axées sur la qualification et l’expérience candidat, avec par exemple, des solutions spécialisées dans la gestion du vivier de talents.
Mais que signifie mieux recruter, à l’heure actuelle, dans un contexte de guerre de talents et face à un marché en tension ? Comment répondre aux divers enjeux de recrutement des entreprises, avec des outils digitaux qui facilitent les usages au lieu de les complexifier ?
Opter pour des outils digitaux adaptés aux enjeux de sa structure
Tout d’abord, avant de faire un choix, il est nécessaire de clarifier les enjeux de sa structure. S’agit-il de récolter un volume plus grand de candidats ? Ou le recrutement de profils plus qualifiés ? D’accélérer le processus de sélection et de recrutement ? Ou encore de réduire le nombre de candidats qui se désistent en cours de processus ?
Il faut ensuite s’assurer que les outils choisis soient adaptés à sa structure. Les grands groupes font régulièrement le choix de s’appuyer sur des outils innovants tels que les sessions de recrutement dans le metaverse, réalisées par Carrefour en 2022. Le dispositif avait été organisé pour recruter des étudiants issus de Polytechnique ou des Mines. A l’inverse, les PME et ETI ont, quant à elles, la possibilité de se doter d’outils faciles à intégrer et assurant un fort retour sur investissement. Il peut s’agir d’un outil de pré-sélection de profils à l’aide des jeux ou de la gamification pour analyser de façon ludique le potentiel des candidats principalement sur les “soft skills”.
Faciliter la rencontre entre l’offre et le candidats
Aujourd’hui, la HR Tech et ses solutions innovantes se développent pour simplifier le processus de recrutement et renforcer la marque employeur. Ces actions stratégiques permettent de se distinguer de la concurrence pour attirer les talents, mais aussi pour faciliter la rencontre entre les offres d’emploi et les candidats.
Miser sur le recrutement programmatique
Le recrutement programmatique consiste à utiliser de la publicité programmatique pour diffuser des offres d’emploi et de communication sur la marque employeur. Par le biais d’annonces publicitaires ciblées grâce à un algorithme, cette technique permet de gagner du temps dans le sourcing des profils. Les internautes ciblés sont segmentés, qualifiés et reçoivent une annonce personnalisée.
Ainsi, le recrutement programmatique peut se matérialiser par la diffusion d’offres d’emplois sous forme de bannières display, de vidéos ou d’annonces textes, sur des sites web spécialisés ou des agrégateurs d’emploi.
En revanche, si le marketing de l’offre permet d’attirer plus facilement les candidats, celui-ci doit correspondre à l’expérience réelle du candidat durant le processus de recrutement. Si le différentiel entre l’expérience promise et celle vécue est trop important, cela pourrait créer un effet déceptif chez le candidat.
Intégrer du contenu d’offre “augmenté’
Le contenu d’offre “augmenté” se présente comme un autre atout du recruteur pour rendre les offres d’emploi plus attractives. En intégrant des vidéos témoignages de collaborateurs ou par la publication d’autres contenus qui valorisent la marque employeur à leur site carrière, le candidat peut mieux appréhender l’environnement de l’entreprise. Certains collaborateurs peuvent également répondre aux interrogations des candidats, en complément des éléments de description du poste. Cela contribue à personnaliser l’expérience candidat.
Offrir une expérience différenciante et évaluer objectivement
Personnaliser son chatbot pour favoriser les interactions
L’utilisation de chatbots, notamment sur les sites carrières, permet d’orienter les candidats et de créer rapidement une interaction avec celui-ci. Cela aura tendance à réduire le temps pour postuler en suggérant des postes en adéquation avec son profil ou sa recherche.
Pour une utilisation efficace, le chatbot doit être régulièrement mis à jour en fonction des nouvelles informations de l’entreprise, et doit être conçu pour créer une réelle plus-value aux équipes de recrutement c’est-à-dire en ayant des questions de pré-sélection à partager au candidat ou en permettant de récolter les données indiquées par ce-dernier dans l’ATS/outil de gestion du recrutement auquel il est intégré.
Des serious games pour une expérience candidat immersive
L’entreprise peut également décider de réaliser des serious games pour faire découvrir de nouveaux métiers comme chez Groupama. Avec son projet Game’Up, le spécialiste de l’assurance a pu renforcer l’attractivité de ses métiers. Ce Serious Game permet d’appréhender la culture de l’entreprise et de découvrir des profils de collaborateurs, avec des séquences de réalités virtuelles immersives. Certains outils facilitent également l’évaluation du candidat sur ses “soft skills” par le biais de simulations sous la forme de jeux vidéos, ayant pour objectif d’aller plus loin dans l’analyse du profil qu’un simple CV. La force de ce type d’outils est de faciliter l’évaluation du candidat, par une analyse objective en limitant les biais inconscientes, précise du potentiel de celui-ci pour le poste à pourvoir selon les compétences préalablement identifiées.
Veiller à la fidélisation des candidats tout au long du processus
Un autre enjeu du recrutement consiste à la fidélisation des candidats durant les différentes étapes du processus de recrutement. Pour assurer une meilleure rétention, l’entreprise doit faire preuve de réactivité, en s’appuyant sur des services distinctifs via la prise de rendez-vous depuis l’agenda du recruteur. On peut prendre l’exemple d’Axa France qui permet à ses candidats de confirmer un entretien avec un recruteur. En quelques clics, sous le même format de prise de rendez-vous chez le médecin en ligne, le candidat peut choisir l’horaire qui lui convient le mieux et échanger dans le cadre d’un entretien, ce qui rend l’expérience candidat et recruteur plus fluide.
Il s’agit aussi de rester connecté au candidat pour entretenir la relation et l’informer de chaque étape, ainsi que des rendez-vous. En réduisant l’incertitude et le temps de réponse, cela augmente les chances de garder le candidat engagé tout au long du processus. Plusieurs outils permettent l’envoi de SMS ou de messages WhatsApp depuis une plateforme. Cela permet à certains recruteurs et aux managers de terrain d’échanger sur les profils et de renforcer la collaboration.
Des outils prédictifs pour anticiper les besoins de demain
Des outils prédictifs offrent la possibilité d’identifier, très concrètement, les besoins en recrutement et la typologie de profils à recruter d’ici 6 mois à 1 an, voire 2 ans. Cela va faciliter le sourcing en capitalisant sur un réservoir de profils qui correspondent aux postes demandés. Il s’agit d’une vraie évolution de l’usage des indicateurs de recrutement. Les ATS permettent d’extraire ces indicateurs. En association avec des outils de “Business Intelligence”, qui servent à transformer des sources de données en insights cohérents de manière visuelle, ils peuvent offrir des données transverses à d’autres domaines RH tels que la gestion des compétences et la mobilité des collaborateurs. L’objectif étant de pouvoir appuyer le besoin de données prévisionnelles de recrutement.
Finalement, l’usage des outils digitaux est une composante primordiale d’un processus de recrutement efficace. Ils sont créateurs de valeur pour l’entreprise par l’automatisation de certaines tâches qui permet un gain de temps et par la diffusion de la marque employeur. Dans un contexte concurrentiel où la productivité est de mise, ils pourront fiabiliser la qualité des recrutements à l’aide de critères d’évaluation objectifs et réfléchis, en amont. Les outils digitaux présentés prennent une place de plus en plus importante dans le recrutement, il est vivement recommandé de les envisager dans une perspective complémentaire aux outils et processus d’intégration, qui sont également sous-estimés alors même qu’ils contribuent à la réussite d’un recrutement. Cependant, les outils ne viennent que comme une couche complémentaire à la dimension humaine qui reste essentielle pour attirer les talents et les conserver durablement.
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Etude IFOP, Les difficultés de recrutement et l’évolution du métier de recruteur, août 2022
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APEC, Bilan 2022 des difficultés de recrutement de cadres, février 2023